Auteur : Liam63
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Disclaimer : Rien n'est à moi.

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Canis lupus
Chapitre 15

 

 

- Qu'est-ce qui vous fait dire que se sont des braconniers ? Interrogea Zech.

- Peut être leurs gros fusils et le loup qu'ils sont en train de torturer dans la cage. Ironisa Wufei. Trowa m'a dit que la chasse était interdite dans le comté.

- C'est vrai. Acquiesça Heero. L'ennui c'est que la maison Jenkins se trouve légalement sur le compté voisin, et là, la chasse est légale. Comment est le loup que vous avez vu ?

- Il a quatre pattes et deux grandes oreilles.

- Son pelage triple buses. Intervint le shérif peu enclin à l'humour.

Et Wufei convint en son for intérieur que ce n'était guère le moment.

- Je dirais noir. Il semblait plutôt gros pour un loup.

- Les plus gros peuvent peser jusqu'à 96 kg. Précisa Zech.

- J'ai lu qu'un tel poids était un record, et à mon avis celui-ci pèse un peu plus.

- Putain !

Wufei s'était bien douté que la nouvelle risquait de ne pas leur plaire mais là ils semblaient franchement atterrés voir paniqués.

- Ça ne peut pas être lui. Coupa l'un des adjoints. Il...

- Ferme-la. L'interrompit son collègue en désignant le Chinois d'un mouvement de la tête.

- De toute manière nous n'avons plus grand chose à lui dissimuler à ce qu'il me semble. Susurra le shérif en contemplant Wufei qui faisait toujours mine de ne pas saisir l'allusion.

Heero qui comme à son habitude gardait une apparente indifférence fit signe à Wufei de s'asseoir.

- Combien étaient-ils ?

- Je n'en sais rien. J'en ai vu trois. L'un d'eux est Van Halen.

Wufei hésita un moment puis poursuivit.

- La pièce est pleine de matériel électronique. Des caméras, des ordinateurs...

- Ils le torturent vraiment ?

- Oui. Je pense qu'ils veulent obtenir quelque chose...

Les deux hommes s'observèrent en silence l'espace de quelques secondes.

- Tu as vu les armes qu'ils portaient.

- Je ne m'y connais pas... Mais c'est le genre de mecs qui irait chasser le chevreuil en tank si tu vois ce que je veux dire. Je ne voyais la scène qu'à travers les planches disjointes qui obstruent les fenêtres alors je ne peux pas t'en dire d'avantage. Je crois... Je crois qu'il allait très mal. Je m'y connais encore moins en méta... en loup qu'en armes mais je crois qu'il va mourir si vous n'intervenez pas immédiatement.

- Ce n'est peut-être pas lui...

L'adjoint, Ben, avait émis son hypothèse à voix basse et d'un ton mal assuré. Il avait juste besoin que quelqu'un soutienne cet argument qu'il savait faux. Un loup noir de plus de 96 seize kilos il n' y en avait qu'un dans le compté.

- Il faut réunir le conseil. Décréta Heero en décrochant son téléphone. Zech saisit sa main au vol et reposa le combiné.

- Non, ce serait une perte de temps. C'est à toi de prendre la décision Heero. Qu'est-ce qu'on fait ?

- C'est toi le shérif !

- Oui mais tu es le second au conseil. Donc tant que Treize reste indisponible, tu es le chef de meute.

Le Japonais prit cette constatation avec la violence d'un coup à l'estomac. Durant quelques secondes le souffle lui manqua. Il n'avait jamais été très sûr de vouloir de cette responsabilité et voilà qu'elle lui tombait dessus sans prévenir. Il n'avait pas vraiment pensé qu'il pouvait arriver quelque chose à Treize, pas avant des années... Et en cas de mort ou de maladie grave l'empêchant d'assumer ses fonctions il y aurait eu les élections qu'il n'avait jamais envisagé de gagner. Mais la situation présente était inattendue. Treize ne pouvait pas assumer son rôle mais seulement momentanément, c'est pour pallier un tel manque que le rôle de second existait. Heero l'avait accepté à contre coeur, persuadé qu'il ne se passerait jamais rien de tel.

- Heero... Insista Zech.

- Ok. On y va. Pas de prisonniers. Il ne doit rester aucun témoin. Ils nous agressent, nous allons leur répondre.

- Et lui ? Demanda Matt en désignant le Chinois.

Mais cette fois Zech ne laissa pas Heero répondre. Il poussa Wufei dans une des cellules et referma la porte.

- Vous n'avez pas le droit de faire ça. Hurla Wufei. Je n'ai commis aucun délit. C'est anticonstitutionnel ! Et puis ce que vous vous apprêtez à faire s'appelle un meurtre !

- Parles en à ton avocat.

Avec un sourire retors, Zech déposa une petite peluche sur une chaise devant les barreaux. Un lapin jaune acheté aux enchères par Quatre à une fête de la paroisse. Un jour ennuyeux à mourir. Zech avait décidé de garder le jouet afin de se souvenir de ne plus jamais laisser son amant le convaincre de participer aux sauteries des culs bénits. Il faisait ça chaque année, il avait une belle collection d'objets ridicules et inutiles à présent. Avec sa gueule d'ange ce petit enfoiré aurait réussit à lui faire traverser la ville en marchant sur les mains.

- Si vous continuez à me faire rire comme ça je vais m'éclater la rate. Grogna l'Asiatique. Écoutez, je ne m'en irais pas... Je dois parler à Duo, je ne peux pas rester coincé ici...

- Nous nous occuperons de votre cas ultérieurement. Le coupa Heero.

- M. Kushrénada m'a donné la permission de rester en ville si je le souhaitais.(1)

Mais les quatre hommes quittèrent le poste de police sans lui accorder un seul regard supplémentaire. Wufei éprouva la violente envie de donner des coups de pieds dans le mur pour exprimer sa contrariété, néanmoins, ayant déjà eu à souffrir d'un tel manque de contrôle il préféra s'abstenir, et se contenta de jurer comme un charretier. Il se fatigua assez vite et à bout de vocabulaire se laissa choir sur le lit étroit. Après tout que faire d'autre que de prendre son mal en patience. Au bout de quatre heures d'attente il en était à discuter avec le lapin synthétique. C'était un interlocuteur très attentif et surtout peu contrariant. Cela lui rappela ce vieux film Harvey (2), et malgré sa situation cette idée lui arracha un sourire. Il aurait du s'inquiéter de ce qui allait lui arriver quand Zech Merquise et les autres reviendraient, mais étrangement il ne se sentait plus vraiment menacé. Après tout il n'avait pas menti, Treize Kushrénada lui avait bien fait comprendre qu'il existait pour lui une possibilité de demeurer à Wolf Lake. Bon évidemment c'était avant qu'il ne se conduise comme un salaud et un crétin avec son fils, enfin son beau-fils, mais au vu de leur attachement réciproque c'était du pareil au même. Qu'est-ce que Duo pensait maintenant ? Et que faisait-il ? Wufei aurait donné cher pour le savoir. Il se sentait triste subitement, il avait tant envie de le voir, de le serrer dans ses bras. Était-il encore possible de recoller les morceaux. Il n' y avait rien de plus difficile à réparer qu'une confiance brisée. C'est avec nostalgie que le journaliste regarda par l'étroite lucarne la nuit envelopper peu à peu la ville. Il s'étonnait de ne voir personne revenir. Comment les choses s'étaient-elles passées ? Les avaient-ils réellement tous tués ? Il réalisa qu'il se posait une question qui n'avait plus de raison d'être puisqu'en réalité il connaissait la réponse. Ils étaient tous morts à l'heure qu'il est. Leur fin avait dû être horrible, ils avaient quitté la vie dans la douleur mais aussi dans la terreur. Wufei ne savait que penser de cela, peut-être parce qu'il concevait les événements comme un être humain et non comme un métamorphe. Des hommes s'étaient introduit sur leur territoire, ils avaient pris l'un des leurs, lui avaient fait du mal, beaucoup de mal... N'avaient-ils pas récolté ce qu'ils avaient semé ? La violence. Un long hurlement déchira la nuit en le faisant sursauter, il avait quelque chose de différent de ce qu'il avait entendu les nuits précédentes. Il perdura de longues minutes et se planta dans son coeur comme si ce son, pourtant impalpable, possédait des griffes acérées. Puis peu à peu des hurlements semblables lui répondirent. Ils étaient emplis de tristesse, de colère et peut-être de peur. Une effervescence se répandait dans la ville comme un cours d'eau en furie, même de là où il était Wufei pouvait percevoir l'agitation qui s'emparait de Wolf Lake. Il se passait quelque chose, quelque chose de grave. Il eut l'impression que sa cellule rétrécissait tant son enfermement et son ignorance des événements lui devenaient insupportable. Il avait la sensation qu'un petit être maléfique et hystérique pelait ses nerfs comme une banane ! Lui aussi se serrait bien mis à hurler, mais de frustration. Il voulait sortir de là, il voulait voir Duo et pour finir il voulait savoir ce qui s'était passé. Il recommençait à s'agiter lorsque les deux adjoints Ben et Matt entrèrent. Leurs vêtements étaient à peu près propres mais leurs mains et leur visage présentaient des taches de sang et de poussière. L'un d'eux ouvrit la porte et fit signe à Wufei de sortir. Le Chinois n'était subitement plus aussi certain de vouloir quitter cet endroit. Voyant son hésitation les deux métamorphes le saisir chacun par un bras et le conduisirent vers la porte avec détermination. Wufei stoppa des quatre fers pour les entraver. Il essaya d'affermir sa voix.

- Où on va ?

- Tu le verras quand on y sera.

- Écoutez, je n'irais nul part si vous ne me dites pas où on va.

Ben se tourna vers lui le regard froid. Finit l'air sympa et bon enfant, un tantinet mutin nota Wufei.

- De deux choses l'une. Tu nous suis gentiment et tout se passe bien, ou alors on est obligé de te forcer la main et là... Crois moi tu n'as pas envie qu'on s'énerve.

- Je suppose que non. Néanmoins si je peux me permettre, être des métamorphes ne vous dispense pas d'être courtois. A moins que j'aie mal évalué la situation et que vous ne soyez réellement que des animaux ! Des hybrides sans honneur.

- Où tu les as grosses comme des pastèques ou tu es inconscient ! Commenta Matt.

- En réalité, elles sont tellement crispées qu'elles doivent avoir la taille de noisettes, mais je souhaite savoir ce que vous comptez faire de moi parce que vous n'avez pas l'air engageant là !

Malgré la situation un sourire échappa à Ben.

- Tu ne risque rien pour le moment. On doit juste t'accompagner chez le maire.

Wufei se laissa guider sans opposer davantage de résistance, d'ailleurs à quoi cela aurait-il servit ? Il monta à l'arrière de la voiture et celle-ci démarra aussitôt. Il hésita à poser d'autres questions puis renonça là aussi, il avait le sentiment qu'aucun de ces deux hommes ne lui fourniraient les réponses qu'il voulait. Il n'était pas tard mais les rues étaient pourtant désertes. Sombre et vide de toute vie Wolf Lake ressemblait presque à une ville fantôme. Tous les commerces étaient fermés, même le bar, qui, pour autant que le Chinois ait pu en juger resté ouvert 24h sur 24. Le trajet lui sembla plus long qu'il ne le fut vraiment et ce fut un soulagement lorsque le véhicule se gara devant la maison. Sa façade éclairait le parvis mais c'était tout, le reste du jardin était plongé dans la pénombre. Pourtant Wufei perçu nettement la silhouette de plusieurs loups qui allaient et venaient entre les buissons et les arbres. Par endroit il était même possible de distinguer leurs empreintes dans le fin duvet neigeux qui couvrait pudiquement le sol. A la suite des deux adjoints, Wufei pénétra dans la bâtisse, heureux de retrouver un peu de chaleur. Il stoppa un peu avant l'immense escalier qui menait à l'étage. Juste assez pour éviter l'homme qui atterrissait avec violence à ses pieds. L'Asiatique pensa à juste titre que la réception sur le ventre devait être indépendante de sa volonté. En haut des marches se tenait Trowa. Majestueux. Et surtout furieux de toute évidence. L'homme se releva puis se tourna vers Heero qui sortait de la cuisine avec un plateau sur lequel reposait des tasses. A l'odeur Wufei compris que c'était du café.

- Il m'a agressé j'exige que tu l'arrêtes.

- Il y a des témoins. Demanda Heero d'un ton qui contait à lui seul son ennui devant ce fait qui lui paraissait sans importance.

Les rares personnes présentes levèrent la tête subitement passionnées par les moulures qui ornaient le plafond. L'homme se tourna vers Wufei.

- Vous, vous l'avez vu ?

- En réalité... Hésita le jeune journaliste, je vous ai seulement vu atterrir. Je ne vous ai pas vu décoller, alors je ne saurais dire comment vous avez fait.

Wufei entendit distinctement les divers gloussements à travers la pièce.

- Raccompagnez donc Iznogoud jusqu'à la sortie. Ironisa Trowa. Le calife n'est pas mort et c'est encore une propriété privée ici. Une propriété sur laquelle vous n'êtes pas le bienvenu.

Bien que l'ordre eut été prononcé par quelqu'un qui n'avait aucune raison de leur en donner, Ben et Matt saisirent l'homme par chaque bras comme ils l'avaient fait précédemment avec Wufei. Celui-ci résista portant à nouveau son attention sur Heero.

- Tu as tord de faire de moi ton ennemi.

- Ennemi ? S'étonna le Japonais. Mais pour que je vous considère comme tel il faudrait que je vous crédite d'une existence. Hors pour moi vous n'en avez aucune.

- Je veux porter plainte contre lui.

- Si vous voulez. Mais il n'y aura pas de suite. Trowa souffre d'un dérèglement hormonal passager suite à sa métamorphose. Le docteur G a en sa possession des analyses qui le prouvent. Vous connaissez notre loi aussi bien que moi. Il ne peut être tenu pour responsable de cet acte de violence dont vous l'accusez même s'il y avait des témoins.

L'homme hors de lui se dirigea vers la porte à grand pas.

- Encore une chose avant que vous ne partiez. L'arrêta Trowa. Si vous osez encore poser vos immondes yeux de vicelard sur mon compagnon je vous éviscère avec une fourchette à gâteaux.

- Ho mais j'ai fait bien plus que d'y poser les yeux... Susurra l'homme heureux de décocher sa flèche empoisonnée. Et je ne suis pas le seul. Mon pauvre ami... Vous avez jeté votre dévolu sur du second choix.

Wufei entendit distinctement le grondement menaçant du nouveau métamorphe. Mais Heero se positionna entre l'homme et les escaliers.

- Nous avons couché ensemble ? C'est étrange je n'en garde aucun souvenir. Il est vrai que je ne me souviens que des hommes avec lesquels j'ai éprouvé un minimum de plaisir... Bonsoir monsieur Eliote.

Cette fois la porte claqua violemment et l'homme disparut. Wufei émit un petit sifflement.

- Je vois qu'on s'amuse. C'est gentil de m'avoir convié à la fête.

Trowa descendit les quelques marches pour rejoindre le Chinois et lui serrer chaleureusement la main.

- Je suis heureux de voir que tu vas mieux.

- Merci.

- Je peux savoir ce qui se passe et pourquoi je suis ici ?

- C'est Duo qui a demandé à ce que l'on t'amène lorsqu'il a appris que tu étais toujours en ville.

- Ha. C'était qui ce mec ?

- Henry Eliote. Le possible successeur de Treize. Un arriviste écoeurant. Enfin... Rajouta-t-il avec une pointe de fiel. Pas si écoeurant que ça je suppose... Il décocha un regard meurtrier à Heero. Ce dernier soupira à l'idée de la scène qui l'attendait. Vivement que ce fichu taux d'hormones revienne à la normale.

 

A suivre...

(1) chap 6
(2) Film de Henry Koster. 1950. Le héros un peu farfelu a pour habitude de discuter avec un lapin imaginaire du nom de Harvey. C'est un film inspiré d'une pièce qui a reçue le prix Pulitzer. Hé oui j'aime les vieux films, nul n'est parfait lol

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